Article - Enjeux des élections communales: la mobilité

Posté le 16/12/2017 dans geen categorie, Non classé @fr, Non classé @fr.

Les questions de l’urbanisme et de la mobilité sont des plus importantes pour la politique communale. Entre le péage urbain, la construction de pistes cyclables sécurisées, les rues piétonnières, la limitation de vitesse des véhicules, … les élus locaux, particulièrement dans les villes, façonnent notre vie quotidienne.
 

Un péage dans les villes belges ?

Une idée fréquemment avancée pour tenter de réduire les embouteillages dans les centres-villes, est la création d’un péage urbain. Les automobilistes paient pour pouvoir circuler dans le centre, comme cela existe déjà à Londres. Le temps perdu dans les embouteillages représente un coût largement supérieur, mais ce coût n’est pas transparent : il n’est pas comptabilisé comme tel dans les comptes des entreprises et des ménages.

Une étude réalisée par le bureau d’études spécialisé sur la mobilité Stratec avance qu’un péage de 3 euros par jour pour chaque automobiliste qui circule dans le centre de Bruxelles entre 6 heures et 10 heures du matin en semaine, rapporterait environ 325 millions d’euros par an à la ville. Grâce à ces rentrées, la ville pourrait payer les coûts de rénovations des tunnels[1]. De tels péages pourraient être instaurés aussi à Anvers ou Liège par exemple. Mais selon la Chambre de Commerce de Bruxelles (BECI), un péage urbain serait coûteux et impopulaire[2]. De plus, d’après l’expérience de Londres, la mise en place d’un péage urbain ne fonctionne que sur une durée limitée. 12 ans après avoir placé son péage, la capitale anglaise a fait le constat début 2017. La vitesse moyenne dans le centre soumis au péage ne fait que reculer depuis quelques années, ce qui implique que de plus en plus de véhicules paient le péage pour se rendre dans le centre[3].

 

Panneaux publicitaires, stop ou encore ?

Plus en rapport avec la sécurité routière, mais aussi avec la mobilité, la question du placement de panneaux publicitaires le long des routes peut être soulevée. En effet, les panneaux munis de lampes LED ont fait leur apparition le long des routes depuis 2013. Ils sont placés là où la circulation est plus dense. Cela peut distraire les automobilistes et augmenter le risque d’accidents. Une circulaire du ministre , publiée fin de l’année 2013, demande aux communes wallonnes de bien vérifier si l’installation de panneaux publicitaires n’est pas un danger pour les usagers de la route[4]. De même, certains défendent le fait que ces panneaux détruisent le paysage et qu’il faut éviter leur prolifération.

 

Le vélo, moyen alternatif efficace ?

Les communes disposent de plusieurs solutions pour améliorer le quotidien des cyclistes. Une première possibilité est de construire davantage de parkings vélos, notamment près des gares. Les couts d’installation de ces parkings vélos sont faibles : 300 euros pour 5 arceaux[5].L’impact budgétaire est différent, si on envisage un parking surveillé, mais ce service peut être payant.

Une autre possibilité est de créer des pistes cyclables sécurisées, séparées de la route, comme il en existe en Flandre. Selon une étude du SPF mobilité datant de 2016, un peu moins de 10% des travailleurs belges utilisent le vélo pour se rendre à leur lieu de travail. Ce chiffre monte à près de 15% en Flandre, mais descend à moins de 5% en Wallonie et à Bruxelles[6]. Et c’est précisément en Flandre, là où les pistes cyclables sont les plus sécurisées, que les citoyens utilisent le plus leur vélo. Cependant, de telles routes cyclistes doivent être prévues à l’avance, et les routes existantes n’ont pas forcément l’espace pour accueillir des pistes cyclables séparées, particulièrement dans les villes. De plus, il ne faut pas oublier qu’il y a davantage de dénivelé à Bruxelles et en Wallonie, sans compter que la distance moyenne à parcourir est plus importante en Wallonie.

Les vélos partagés, comme les systèmes Villo!, oBike, Billy Bike et GoBee Bike ont un succès croissant à Bruxelles. Ces derniers sont plus souples que Villo ! puisque l’utilisateur laisse le vélo où il veut. Il trouve un vélo libre grâce à une application sur son smartphone. L’utilisation du vélo à Bruxelles a augmenté de 4,6% en 2016 par rapport à 2015[7]. Villo a dépassé 1,5 millions de locations en 2016. Néanmoins, seul une faible minorité de navetteurs utilise le vélo pour se rendre au travail dans la capitale (moins de 5%)[8]. Ce sont les déplacements autre que pour le travail qui sont davantage réalisés à deux roues.

 

Les piétonniers, bonne idée mais gestion questionnée

La création de centres piétonniers, au cours des années, fut autant soutenue que décriée. Selon une étude réalisée par Atrium Brussels, l’agence régionale du commerce, un piétonnier a beaucoup de défauts. Il ne manque pas de gens pour critiquer la gestion par la ville de Bruxelles de son projet de centre piétonnier autour de la Bourse[9]. Néanmoins, l’idée du piétonnier est soutenue par une majorité de passants (sept sur dix) comme de commerçants (un peu plus de 50%)[10].

Il est vrai que la plupart des villes belges doivent faire face à un déclin de leurs rues commerçantes, et c’est particulièrement le cas en Flandre, avec une baisse des commerces locaux de plus de 15%[11]. Le piétonnier est donc un choix envisageable par les autorités communales pour tenter de redynamiser leurs centres commerçants sur le déclin. De plus, en Wallonie, les communes peuvent compter sur le fonds d’investissement des communes, un fonds régional géré par le ministère des pouvoirs locaux. C’est « un programme d’investissements communaux visant essentiellement les travaux de voirie, d’égouttage, d’éclairage public et la rénovation de bâtiments publics. »[12].

 

La limitation de vitesse

Il convient également d’assurer une sécurité routière pour tous les usagers de la route, en allant du camion au vélo. En 2012, une étude réalisée par l’ Institut Belge pour la Sécurité Routière  (ISBR) indiquait que « la vitesse moyenne d’un automobiliste non gêné par les conditions de circulation est supérieure à la vitesse maximale autorisée sur tous les types de route sauf les routes à 90 km/h »[13]. Pour contrer cela, les communes ont la possibilité de placer sur les routes des obstacles, allant de la chicane au coussin berlinois. Toutefois, ces ralentisseurs ne peuvent pas être placés n’importe où. Ils peuvent être installés en agglomération et hors agglomération. Dans le deuxième cas, il faut qu’ils soient prévus près d’habitations ou de lieux fréquentés, ou sur une route ne dépassant pas 50 km/h, ou devant un carrefour ayant une priorité venant de la droite[14].

S’il est vrai que ces obstacles routiers obligent les automobilistes à ralentir et remplissent donc leur objectif facilement, ils ne sont pas exempts de critiques pour autant. En 2016, Touring a critiqué l’usage des ralentisseurs par les communes, estimant qu’il était excessif et souvent non-conforme à la législation en vigueur. Bien souvent, ils sont trop surélevés, ce qui occasionne des dégâts aux voitures[15]. Deux alternatives peuvent être avancées.

La première, pour remplacer ces ralentisseurs, serait l’élargissement de l’utilisation des zones de limitation de vitesse à 30 km/h, comme cela se fait déjà aujourd’hui devant les écoles. Au lieu de faire courir le risque aux automobilistes avec des ralentisseurs pouvant endommager leurs voitures, l’idée serait de placer ces zones 30 km/h dans les zones à risque, et placer également des radars, qu’ils soient préventifs ou répressifs, afin de contrôler les usagers empruntant cette voirie. Un débat sur la généralisation de cette limitation à 30 km/h de la région de Bruxelles-capitale a déjà fait parler de lui en septembre 2017. En effet, depuis 2010, à Bruxelles, l’intérieur de la petite ceinture est déjà sous limitation à 30 km/h. Et récemment, la commune d’Ixelles a décidé de suivre le mouvement. Selon la porte-parole du GRACQ, certains avantages seraient que cela diminue le nombre d’accidents ainsi que leur gravité, cela réduit la pollution et fluidifie le trafic[16]. A l’inverse, la ligue de défense des conducteurs a produit une étude qui avance que limiter la vitesse en agglomération à 30 km/h provoque une augmentation de la pollution, car le régime du moteur est plus élevé à 30km/h qu’à 50 km/h, augmente le temps de trajet, ne réduit pas le nombre d’accidents et peuvent empêcher les véhicules d’urgence de circuler proprement, mettant ainsi potentiellement des vies en danger[17]. Il est possible de voir que l’opposition entre les deux parties est très forte et que davantage d’études devront être réalisées afin de dégager un résultat clair quant à l’utilité de cette éventuelle réforme.

La deuxième solution, déjà utilisée dans la plupart de nos communes, est celle des radars. Ils permettent le ralentissement du trafic et offrent une manne financière à la commune. Selon une étude de l’université de Hasselt, « Une caméra automatique installée à un carrefour fait baisser le nombre d’accidents de 14 %, tandis que le nombre d’accidents ayant entraîné des lésions corporelles se voit réduit de 27 %« [18]. On observe toutefois aussi une augmentation des collisions en chaine, à cause des coups de frein brusque de la part des conducteurs à l’approche de ces caméras[19]. Néanmoins, ils ne sont pas sans problèmes. D’abord, notamment en Flandre, plus d’un radar sur cinq serait défectueux, et le ministre flamand de la mobilité, Ben Weyts, se plaint de ne pouvoir assurer leur fonctionnement[20].

 

Jonathan Jacquemart, 16 décembre 2017.

[1] L’ECHO, un péage à Bruxelles rapporterait 325 millions d’euros par an [en ligne], https://www.lecho.be/tablet/newspaper-une/Un-peage-a-Bruxelles-rapporterait-325-millions-d-euros-par-an/9726058?utm_campaign=nextarticle (consulté le 28-11-17).

[2] BECI, Le péage urbain – une idée controversée ! [en ligne], http://www.beci.be/centre_de_connaissance/mobilite/peage_vignette_et_taxation/ (consulté le 28-11-17).

[3] TRENDS TENDANCES, Echec du péage urbain à Londres, qui envisage le péage kilométrique [en ligne], http://trends.levif.be/economie/politique-economique/echec-du-peage-urbain-a-londres-qui-envisage-le-peage-kilometrique/article-normal-602267.html (consulté le 17-12-17).

[4] GOUVERNEMENT WALLON, (2013), « Circulaire concernant les panneaux publicitaires diffusant des messages dynamiques sur écrans numériques », pp. 1-2.

[5] GRACQ, Avantages pour l’employeur [en ligne], https://www.gracq.org/avantages-pour-lemployeur (consulté le 30-11-17).

[6] PAUWELS, C. & ANDRIES, P., (2016), « Diagnostic des déplacements domicile – lieu de travail 2014 », Service public fédéral, Mobilités et transports, p. 8.

[7] VILLO !, Villo! a dépassé 1.5 millions de locations en 2016 [en ligne], http://www.villo.be/Villo!-a-depasse-1.5-millions-de-locations-en-2016 (consulté le 04-12-17).

[8]  PAUWELS, C. & ANDRIES, P., (2016), op.cit.

[9] DAGNIES, J. & GOELFF, M., (2016), « Quel avenir pour le commerce en centre-ville ? L’indispensable présence des commerces pour soutenir la qualité de vie dans nos villes », CEPESS, p. 18.

[10] ATRIUM BRUSSELS, Le piétonnier passe douloureusement son grand oral [en ligne], http://atrium.brussels/fr/blog/le-pietonnier-passe-douloureusement-son-premier-grand-oral/#constat-n-1-une-frequentation-volatile-du-pietonnier (consulté le 30-11-17).

[11] DAGNIES, J. & GOELFF, M., (2016), op.cit., p. 12.

[12] FOCUS SUR LA COMMUNE, « 100 fiches pour une bonne gestion communale », UVCW, Ressources de la commune, Finances, Fiche 7, p. 1.

[13] RIGUELLE, F., (2013), Mesure nationale de comportement en matière de vitesse – 2012. Bruxelles, Belgique: Institut Belge pour la Sécurité Routière – Centre de connaissance Sécurité Routière, p. 3.

[14] PONCHAUT, A., « Le point sur les dispositifs ralentisseurs surélevés », UVCW, p. 1.

[15] TOURING, Casse-vitesse : comment réagir en cas de dégâts? [en ligne], https://www.touring.be/fr/articles/casse-vitesse-comment-reagir-en-cas-de-degats (consulté le 26-10-17).

[16] LA LIBRE, Généraliser la limite des 30 km/h à Bruxelles ? [en ligne], http://www.lalibre.be/debats/ripostes/generaliser-la-limite-des-30-kmh-a-bruxelles-59b81fc0cd703b65924b1cc4 (consulté le 13-11-17).

[17] Ligue de défense des conducteurs, « ENQUÊTE : la face cachée des villes à 30 km/h », mars 2017.

[18] RTL INFO, Radars automatiques: 350 millions d’euros/an d’économies en Flandre [en ligne], http://www.rtl.be/info/belgique/societe/radars-automatiques-350-millions-d-euros-an-d-economies-en-flandre-241.aspx  (consulté le 16-12-17).

[19] CENTREX CIRCULATION ROUTIERE, L’efficacité des radars [en ligne], http://www.lokalepolitie.be/centrex/fr/home/actualite/lefficacite-des-radars.html (consulté le 16-12-17).

[20] LE VIF, Radars : entre la Flandre et le Fédéral, ça ne flashe pas [en ligne],

http://www.levif.be/actualite/belgique/radars-entre-la-flandre-et-le-federal-ca-ne-flashe-pas/article-normal-763251.html (consulté le 16-12-17).

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