Article - Le référendum grec du 5 juillet, est-il une illustration de l’échec de la démocratie directe ?

Posté le 08/09/2015 dans NousCitoyens.

Aucun système politique ne garantira de bons résultats, si on abuse des règles pour servir des intérêts personnels ou de parti. Pour obtenir de bons résultats, comme en Suisse, les référendums doivent respecter des règles strictes. Les référendums font partie d’une culture politique de plus grande implication des citoyens. L’Europe a introduit les « Initiatives Citoyennes Européennes ». Ce serait un grand progrès pour la Belgique fédérale que d’introduire un tel système.

Sentant la faillite du pays s’approcher, le premier-ministre, Tsipras, a convoqué un référendum : pour ou contre le plan d’austérité imposé par les autorités européennes. A priori, quand on pose la question aux gens s’ils sont pour ou contre l’austérité, on ne s’attend pas à ce qu’ils demandent massivement l’austérité. Ils ont tout de même été 38,69% à voter pour !

La suite des événements semble démontrer que le référendum était inutile parce que les Grecs n’avaient pas le choix. Le choix de sortir de la zone Euro et de réintroduire la Drachme a été rejeté par le même qui préconisait le refus des règles du jeu de la zone Euro !

Le problème du référendum grec n’est-il pas que les autorités grecques auraient menti ? Là où règne le mensonge et/ou l’incompétence, aucun système politique n’apportera une solution satisfaisante. Mais puisque le monde sera toujours peuplé de gens plus ou moins dénués de scrupules, quel est le système qui limite le mieux les dégâts ? À la longue c’est incontestablement la vraie démocratie.

Or le référendum impératif sur initiative populaire est un élément essentiel d’une vrai démocratie, sans quoi il est relativement facile pour une petite nomenklatura de confisquer le pouvoir. La partitocratie en est l’exemple le plus courant.

Contrairement à ce qui s’est fait en Grèce, il faut respecter un certain nombre de conditions pour que le référendum produise de bons résultats. Une de ces conditions est particulièrement importante lorsque la matière est complexe : offrir le choix entre des scénarios bien définis. Choisir pour ou contre le programme d’austérité à l’européenne n’est pas correct. Il faut décrire avec le même niveau de détails le scénario alternatif à ce plan d’austérité. Il faut une institution capable de quantifier les effets des mesures politiques proposées. C’est ce que les partis belges avaient demandé, en vain, au Bureau du Plan lors des élections de 2014.

TarteEn mai 2014, NousCitoyens a fait un sondage de la population impliquant 7823 répondants. A la question « La Belgique doit instaurer les référendums impératifs sur initiative populaire », 50% des citoyens sont favorables et 26% contre.

En l’absence de référendum, les citoyens peuvent organiser des pétitions. Il y a même des sites spécifiques pour faciliter les opérations, comme par exemple le site flamand www.petitie.be . Toutefois, les citoyens peuvent perdre la motivation d’y participer à cause du manque d’impact à court terme.

L’Union européenne a mis en place un dispositif impressionnant pour permettre à la population de mettre certains sujets à l’agenda politique. Les dites « European Citizens Initiatives » (ECI) obligent, en principe, la Commission européenne à faire un projet législatif lorsque plus d’un million de signatures sont récoltées dans un nombre suffisant de pays.
En pratique, il y a eu 51 projets. Plus d’un tiers a été rejeté avant le démarrage de la pétition, parce que le service juridique de la Commission jugeait que la proposition ne tombait sous la compétence de l’Union européenne. Seules 3 propositions ont réussi à récolter les signatures requises, ce qui montre que le seuil est un véritable défi. Les trois sujets étaient : l’eau comme droit humain, l’interdiction d’activités impliquant la destruction d’embryons humains, l’interdiction de la vivisection.

Mais la Commission européenne a refusé les trois fois de prendre une initiative législative, ce qui ne manque pas de causer une certaine perplexité. Le manque de résultat législatif a apparemment découragé les militants de tous bords. Il n’y a plus que trois ECI en cours : l’effet de mode est passé.

Il nous semble que la tenue d’un vote parlementaire serait un stricte minimum, comme obligation des institutions européennes lorsqu’une ECI atteint le seuil d’un million de signatures. En effet le vote parlementaire introduit au moins deux avantages : un débat public et la transparence. Le citoyen a le droit de connaître la position de chaque europarlementaire. L’ECI comme une étape dans la bonne direction.

La Lettonie a introduit un système ECI à l’échelle nationale. Notre législateur fédéral pourrait s’en inspirer, en attendant d’instaurer le référendum impératif sur initiative populaire.

NousCitoyens entend rester neutre sur le plan politique, à quelques exceptions près, décrites dans notre charte. Nous militons pour une meilleure démocratie, et le référendum fait partie de ce programme. A ce titre, NousCitoyens est partenaire de l’ASBL flamande Democratie.Nu et membre de Democracy International. Nous reviendrons ultérieurement sur les arguments fréquemment entendu pour ou contre le référendum.

Jean-Paul Pinon, 16 juillet 2015

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